Agriculteurs des bas-champs en colère

     Les agriculteurs des bas-champs de Cayeux viennent de découvrir que le ministère de l’agriculture a retiré leurs terres de la liste des zones à handicap naturel. Cette liste est transmise aux services de la communauté européenne pour obtenir les aides particulières aux zones défavorisées. Colère dans les exploitations car la production brute par hectare y est inférieure de 80% à la moyenne nationale !

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      Ce sont des terres toutes plates, que la mer venait lécher, quelques siècles en arrière. Avec l'ensablement et les renclôtures, elles sont au fil du temps devenues des terres agricoles. Des canaux les parcourent, facilitant le drainage et l'écoulement vers la mer des eaux de pluie. Cayeux-sur-mer compte aujourd'hui huit exploitants agricoles, dont les productions sont diversifiées. Pour tous, l'élevage constitue une part importante de l'exploitation. Les agriculteurs des bas champs contribuent par leur travail à façonner un paysage herbager.

Emmanuel Noiret

Emmanuel Noiret

     Emmanuel Noiret élève des vaches laitières et d'autres pour la viande, "quand j'ai appris la nouvelle, mercredi, raconte-t-il, ça a été un immense découragement. Nous avons commencé à monter ce dossier il y a près de quatre ans. Des démarches administratives longues et fastidieuses. Et au moment où nous pensions y être enfin arrivés, on nous retire de la liste..."  Il explique, raconte cette terre à handicap telle qu'il la vit tous les jours. Le vent, si fréquent, qu'il contrarie la pousse des céréales, la pluie qui noie les champs bien trop souvent, les parcelles, si petites que ces collègues agriculteurs des terres plus favorisées osent bien souvent la moquerie, disant "ce ne sont pas des parcelles, que vous cultivez dans les bas-champs, ce sont des jardins !" 

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      Un peu plus loin, en empruntant le chemin des sables à partir de la Mollière d'Aval,  nous retrouvons Régis Brunet. Dans son exploitation, on trouve veaux, vaches, mais aussi cochons. Comme tous dans les bas-champs, il se bat, pour tirer de la terre un revenu sans commune mesure avec celui des céréaliers des terres généreuses de l'Est de la Somme. "Ce classement, c'est l'espoir d'une aide financière, explique-t-il, mais c'est aussi une reconnaissance, un symbole."

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     Ailleurs en France les agriculteurs touchés par la révision de cette carte ont pu, en manifestant bruyamment, se faire restituer leur classement. Mais en Picardie maritime, sur les communes de Cayeux, Brutelles, Lanchères, Pendé et Woignarue ils ne sont pas en nombre suffisant pour inciter, par la démonstration de force, le ministère de l’agriculture à lever cette pénalisation.

Régis Brunet

Régis Brunet

      Le président du Conseil Départemental, Laurent Somon et le président du syndicat mixte Baie de Somme-Grand Littoral Picard, Stéphane Haussoulier sont intervenus auprès du ministre de l’agriculture, Stéphane Travert pour l'inciter à réintégrer les zones humides des bas-champs dans la carte des zones agricoles à handicap naturel qui sera proposée à la commission européenne le 1er mars prochain. "Ces agriculteurs, écrit Laurent Somon, ont porté de longue date, dans le respect des procédures et sans agitation outrancière, leur dossier, afin de faire reconnaitre le handicap nature qui touche leurs prairies..." Suggérant ainsi qu'il serait bien injuste que leur sagesse les pénalise...

     Stéphane Haussoulier souligne le fait que "l'élevage fait partie intégrante du paysage économique, social et environnemental du Grand Site de France Baie de Somme." Il y a deux ans, pour diversifier leur production, s'adapter à un marché en quête de lien entre consommateur et producteur, les agriculteurs des bas champs se sont lancés dans l'innovation d'une pomme de terre primeur. Une marque est née, "Baie de Somme Saveurs" qui trouve déjà une reconnaissance auprès du public. Ils ont choisi de ne pas baisser les bras. Malgré la crise, malgré le handicap territorial, malgré la crise agricole qui touche avant tout les plus faibles. Ils espèrent être accompagnés, reconnus dans leurs efforts pour l'entretien d'un paysage apprécié par tous.

Plus d'infos sur le Comité de pilotage ministériel.  Et sur la carte telle qu'elle était présentée quand les praires maritimes du littoral picard y figuraient encore.